Les jumelles et les ours blancs
En ce 26 décembre, Nirlik a appelé sa jumelle pour savoir comment s'était déroulé son Noël en France, mais au moment où sa sœur décrochait, elle s'est soudainement mise à repenser à un matin d'il y a longtemps, alors que les deux jumelles avaient 7 ans... ce fameux jour où elles avaient vécu une aventure extraordinaire, bien qu'elle aurait pu tourner au drame, et qui leur avait valu une fameuse punition.
- Hai Saila ! Te souviens-tu de nos ours polaires ?
- Oh la la ! Comment oublier ça ?! répond Saïla.
Et les voici parties à se remémorer l'anecdote que voici.
Comme on l'a vu il y a quelque temps (ICI), leur père avait fixé des skis sous le fauteuil roulant de Saïla afin que Nirlik puisse le pousser facilement sur la neige et leur redonner plus d'autonomie pendant l'hiver. Les fillettes ne se sont pas fait prier pour utiliser l'invention : dès la neige arrivée, on les a vues partout dans le village, profitant de leur liberté de mouvement permise en dépit du tapis blanc.
Hum... dans le village. Autour du village. Et même un peu plus loin parfois. Comme ce fameux jour où elles ont décidé d'aller loin sur la glace, du côté opposé à celui où les hommes pêchaient, dans une crique masquée par un éperon rocheux qui leur donnait l'impression d'être au bout du monde, où les jeunes aimaient venir en été.
Malheureusement, le vent du large avait soufflé beaucoup de neige sur la glace de la crique, et Nirlik ne pouvait plus pousser plus loin le fauteuil sur skis.
Elle venait de dire à Saïla qu'elle allait reculer dans ses propres traces et qu'elles allaient rentrer quand elles ont entendu un grognement caractéristique.
Une femelle ourse polaire et deux oursons arrivaient vers les fillettes terrifiées.
Ils se sont arrêtés près d'elles et se sont tournés pour les regarder. La mère grognait en secouant la tête, ouvrant la bouche pour humer l'odeur des deux sœurs.
Puis le premier ourson s'est avancé et a reniflé les appui-pieds du fauteuil roulant et a éternué !
En entendant l'éternuement, Saïla n'a pas pu se retenir : elle s'est mise à rire. Nerveusement, Nirlik a éclaté de rire à son tour.
Cela a semblé déconcerter la mère qui s'est mise à regarder les fillettes tranquillement, sans bouger.
Comme suspendu dans le temps, cet instant a paru durer une éternité, pendant laquelle les oursons continuaient à renifler le fauteuil roulant et l'ourse à observer les deux petites humaines.
Puis, comme si le déroulement du temps retrouvait son cours normal, dans un dernier grognement, la mère ourse s'est détournée et a repris son chemin, suivie des deux petits qui trottinaient derrière elle.
Les filles les ont regardé s'éloigner, hésitant entre peur rétroactive et émerveillement, jusqu'à ce qu'il ne reste plus que leurs traces dans la neige.
Nirlik a péniblement fait reculer le fauteuil roulant de sa jumelle et elles sont rentrées. Elles n'ont pas eu besoin de raconter leur rencontre car les gens parlaient déjà des ours qui étaient passés près du village.
Bien que les fillettes aient été habituées aux chasses nécessaires que font les hommes inuits, pour nourrir et protéger leurs familles, elles ont été très contentes d'apprendre que personne ne traquerait cette mère puisqu'elle s'était éloignée et ne représentait plus de danger pour le village.
Mais lorsque quelqu'un a rapporté que les traces dans la neige démontraient que les fillettes s'étaient trouvées en présence des ours, les deux sœurs ont bien été obligées d'avouer leur rencontre.
Ce qui leur a valu un sermon de leur père et une méga-punition de leur mère.
Elles sont prudemment retourné en secret dans la crique durant tout l'hiver, et elles ont aperçu la mère et ses petits au loin, mais (heureusement) elles n'ont plus jamais eu l'occasion de les voir d'aussi près.
- Quelle frousse on a eue ! Mais c'était quand même un moment presque magique, conclut Nirlik.
- Magique, je ne sais pas, c'était plutôt vexant pour moi quand j'y repense : comment pourrais-je oublier que mes pieds font éternuer les ours !! s'esclaffe Saïla.
À ces mots, les deux sœurs ont piqué une crise de fou-rire.
Ensuite, leur conversation a dévié sur la description du réveillon du 24 au soir chez chacune, puis de la journée du 25.
Mais je vous raconterai ça plus tard, parce que pour le moment, je voudrais vous parler des ours polaires.
Savez-vous qu'en réalité, leur fourrure n'est pas blanche ? ni jaune d'ailleurs comme elle semble souvent l'être par rapport au blanc bleuté de la neige. Eh non : leur fourrure est translucide, et sous ce pelage, leur peau est noire ; ce phénomène leur permet d'absorber la chaleur du soleil.
Pour survivre, un ours polaire doit manger approximativement 43 phoques annelés par an, pour assurer son stock de graisse.
La chose la plus étonnante que j'ai apprise sur ces magnifiques mammifères est que les femelles peuvent mettre "en pause" leur gestation si leur réserve de graisse est insuffisante pour assurer le bon développement des futurs petits et leur propre survie. Un phénomène qui serait unique dans la nature. Supéfiant, non ?
Et pour finir : sur une population mondiale estimée à 25 000 individus, le Canada en abrite environ 16 000 à lui tout seul.
Bonne journée :-)
♥♥♥
On this December 26, Nirlik called his twin sister to find out how her Christmas in France had gone, but as his sister picked up, she suddenly started thinking back to a morning long ago, when the twins were 7 years old... that famous day when they had lived an extraordinary adventure, although it could have turned into a tragedy, and which had earned them a famous punishment.
- Hai Saila! Do you remember our polar bears?
- Oh la la! How could we forget that?! replied Saïla.
And here they are, reminiscing about the following anecdote:
As we saw some time ago (HERE), their father had fixed skis under Saïla's wheelchair so that Nirlik could easily push it on the snow and give them more autonomy during the winter. The girls didn't need to be asked twice to use the invention: as soon as the snow came, they were seen everywhere in the village, taking advantage of their freedom of movement despite the white carpet.
Hmm... in the village. Around the village. And even a little further sometimes. Like that famous day when they decided to go far out on the ice, on the opposite side from where the men were fishing, in a cove hidden by a rocky spur that gave them the impression of being at the end of the world, where young people liked to come in the summer.
Unfortunately, the offshore wind had blown a lot of snow onto the ice of the cove, and Nirlik couldn't push the chair on skis any further.
She had just told Saïla that she was going to backtrack in her own tracks and that they were going to go back when they heard a characteristic growl.
A female polar bear and two cubs were coming towards the terrified girls.
Bears stopped near them and turned to look at them. The mother growled as she shook her head, opening her mouth to smell the two sisters.
Then the first cub came forward and sniffed the footrests of the wheelchair and sneezed!
Hearing the sneeze, Saïla couldn't help herself: she started laughing. Nervously, Nirlik burst out laughing too.
This seemed to disconcert the mother who began to look at the little girls quietly, without moving.
As if suspended in time, this moment seemed to last an eternity, during which the cubs continued to sniff the wheelchair and the mother bear to observe the two little humans.
Then, as if the flow of time was returning to normal, with a final growl, the mother bear turned away and continued on her way, followed by the two little ones who were trotting behind her.
The girls watched them go away, wavering between retroactive fear and wonder, until only bears' tracks remained in the snow.
Nirlik painfully pushed his twin sister's wheelchair back and they went back to the village. They didn't need to tell anyone about their encounter because people were already talking about the bears that had passed near the village.
Although the girls were used to the necessary hunts that Inuit men do to feed and protect their families, they were very happy to learn that no one would track this mother because she had moved away and was no longer a danger to the village.
But when someone reported that the tracks in the snow showed that the girls had been in the presence of the bears, the two sisters were forced to confess to their encounter.
Which earned them a lecture from their father and a mega-punishment from their mother.
They cautiously returned in secret to the cove throughout the winter, and they caught sight of the mother and her cubs in the distance, but (fortunately) they never had the opportunity to see them so close again.
- What a fright we had! But it was still an almost magical moment, concluded Nirlik.
- Magical, I don't know, it was rather annoying for me when I think back on it: how could I forget that my feet make bears sneeze!! laughed Saïla.
At these words, the two sisters threw a fit of giggles.
Then, their conversation deviated to the description of New Year's Eve on the 24th in the evening at each of them, then of the day of the 25th.
But I'll tell you about that later, because for now, I want to talk to you about polar bears.
Do you know that in reality, their fur is not white? nor yellow for that matter. No, their fur is translucent, and under this fur, their skin is black; this phenomenon allows them to absorb the heat of the sun.
To survive, a polar bear must eat approximately 43 ringed seals per year, to ensure its fat reserves.
The most astonishing thing I learned about these magnificent mammals is that females can "pause" their gestation if their fat reserves are insufficient to ensure the proper development of the future young and their own survival. A phenomenon that would be unique in nature. Amazing, right?
And finally: out of an estimated world population of 25,000 individuals, Canada alone is home to about 16,000.