Les rêves de Samantha, son violon, et... Paganini
En cette année 1910, à l'âge de 16 ans, où la plupart des jeunes filles commencent à penser à leur future vie de femme en tant qu'épouse, Samantha, elle, ne rêve que de voyages archéologiques lointains et de découvertes innovantes. Elle voyagera de préférence accompagnée par un époux aimant, mais s'il n'y en a pas qui accepte ses rêves, elle les vivra seule, a-t-elle expliqué un jour en prenant le thé, choquant ainsi son austère oncle canadien (chez qui elle vit depuis 2 ans). Sa tante s'était contentée de sourire discrètement, bien convaincue que la jeune fille changerait d'avis quand, inévitablement, son coeur se mettrait à battre un jour pour un jeune homme.
En attendant que l'espérance de tante Frieda se réalise, ou pas, notre Samantha se tient au courant avec enthousiasme de toutes les nouveautés. Nouveautés, qui, il faut le reconnaitre, étaient innombrables en ce début de 20e siècle. Par exemple, comme nous l'avons vu récemment, elle vient de s'acheter une bicyclette, mais elle aimerait tant pouvoir s'asseoir derrière le volant d'une de ces voitures bruyantes qu'elle voit passer dans la rue !
Par ailleurs, en dehors de son intérêt pour les nouvelles techniques et l'exploration, elle aime passionnément lire (tout ce qui lui tombe sous la main ! du roman d'amour au compte rendu des expéditions de Pierre Savorgnan de Brazza en Afrique équatoriale !) mais elle est aussi une excellente peintre (activité qu'elle a toujours voulu exercer par amour pour sa regrettée maman qui était une peintre de renom), et pour finir, elle joue avec excellence du violon.
Par contre, ne lui demandez pas trop de broder ou de coudre ; elle pratique, mais vraiment sans enthousiasme et sans grande réussite !
Très différente d'elle, sa calme cousine Romina aime les travaux d'aiguilles et espère rencontrer un jeune homme qui l'aimera passionnément et avec lequel elle aura de beaux enfants qu'elle rêve d'élever à la campagne dans une grande maison qu'elle aura plaisir à diriger. Elle n'en demande pas plus à la vie.
L'arrivée imprévue de Samantha dans le foyer familial il y a deux ans lui a apporté un grand courant d'air neuf et dynamique qui l'amuse et qu'elle aime beaucoup respirer, mais sans aucune envie de se lancer dans ce courant de modernisme qui ne correspond pas à ses aspirations paisibles.
Ce qui ne les a pas empêchées de devenir très rapidement les deux meilleures amies du monde.
Romina lit, mais modérément, des romans sentimentaux essentiellement. Et comme Samantha, elle joue du violon, mais là encore, elle joue tranquillement, avec un certain talent, mais sans la brillance d'interprétation de Samantha qui n'hésite même pas parfois à modifier quelque chose dans son jeu par rapport à ce qui était initialement prévu dans le morceau.
Et aujourd'hui, comme il pleuvait, les deux cousines sont restées à l'intérieur et se sont amusées à pratiquer leur violon.
Ici, nous voyons Romina en admiration devant la virtuosité de Samantha qui s'est lancée dans une folle interprétation e La Campanella de Paganini... morceau particulièrement difficile et spectaculaire s'il en est !
Si vous voulez vous rendre compte à quel point cette pièce de musique est "spectaculaire", cliquez sur cette vidéo et écoutez ! c'est assez impressionnant, l'archet vole littéralement sur les cordes.... ce n'est vraiment pas fait pour des débutants !
Niccolo Paganini "était surnommé "le violoniste du diable", ce n'était pas pour rien, certains envieux et mauvaises langues de l'époque colportant le fait qu'il aurait vendu son âme au diable afin d'acquérir l'invraisemblable virtuosité qui le caractérisait.
Et cette réputation alla très loin puisqu'à sa mort, en 1840 à Nice, il a été accusé d'impiété par l'évêque de Nice, Dominique Galvano : l'enterrement religieux lui a été interdit, ainsi que l’inhumation en terre consacrée... ce qui a alors été le début d'une rocambolesque suite de "déménagements" du cercueil dont voici l'histoire :
Un ami de l'artiste, le comte de Cessole fait embaumer le corps, qui est exposé à Nice et est de nouveau pris pour celui d'un suppot du diable. Le comte de Cessole fait enlever le cercueil, qui va connaître un étonnant périple. Il est alors déposé à Nice dans une propriété du comte de Cessole, au Lazaret de Villefranche. En avril 1844, il est transféré dans la maison paternelle de Paganini Romairone près de Gênes. Puis en 1853 à la villa Paganini près de Parme. En 1876, le pape Pie IX ayant réhabilité Paganini, le cercueil est transféré au cimetière de la Steccata à Parme. Coup de théatre, il y a déclassement de ce cimetière 20 ans plus tard ! Le cerceuil est alors placé dans un monument du cimetière de la Villetta de Parme. Après un tel périple, suite à des doutes sur l'authenticité du corps (les mauvaises réputations et légendes sont tenaces !), le cercueil est ouvert en 1893 en présence du fils de Niccolo Paganini.... qui ne peut évidemment pas officiellement affirmer qu'il s'agit bien du corps de son père.
Le doute continue à planer pour certains : le corps de l'artiste serait-il bel et bien parti chez le diable ?!! nous laissant des partitions de musique que seuls les violonistes les plus chevronnés sont capables d'interpréter...
Je vous laisse rêver sur l'histoire....
Bonne journée :-)
♥♥♥